Avec le printemps vient
la campagne de réhabilitation des formations, longue procédure qui
vise à faire un bilan des formations proposées par les universités
devant notre ministère afin qu'il décide si ces formations peuvent
ou non continuer pour une nouvelle période de 4 années. Comme pour
beaucoup de procédures universitaires, c'est un travail de fond qui
commence très tôt : les dossiers sur lesquels nous travaillons
concernent un renouvellement pour la rentrée 2014. Et cette année
en tant que responsable de formation, c'est à moi qu'échoit une
grande partie du travail sur le dossier (heureusement épaulé par le
reste de l'équipe et le chef de mon département d'enseignement).
Construire un dossier de
réhabilitation est un exercice à la fois administratif et
pédagogique. Tout d'abord il faut dresser un bilan sincère de la
formation : effectifs, attractivité, taux de réussite,
débouchés des étudiants sur x années. Il faut justifier l'intérêt
de cette formation pour les étudiants et en identifier les forces et
faiblesses (les relecteurs des dossiers étant tout sauf des sots, il
est inutile d'envisager de cacher la poussière sous le tapis).
Ensuite il faut à partir de ce constat faire des propositions
d'évolutions, qui quand on enseigne dans un domaine lié aux
nouvelles technologies sont souvent conséquentes d'une habilitation
sur l'autre. En 4 années, le paysage des NTIC a beaucoup changé et
les métiers qui y sont associés aussi, les formations doivent donc
suivre le mouvement, faute de quoi nous allons former de futurs
professionnels sur des outils et méthodes obsolètes, ce qui est
vite contre-productif.
La question qui se pose
donc est de savoir qu'elles seront les technologies et les méthodes
à la pointe sur la période 2014-2018 et quels seront donc les
enseignements à mettre en avant sur cette nouvelle habilitation. La
réponse n'est pas simple du tout et demande une forte capacité de
projection dans l'avenir. Se baser trop fortement sur ce qui marche
en ce moment présente le risque de proposer une formation déjà
dépassée dès son renouvellement, vouloir trop se projeter dans
l'avenir présente le risque de faire des propositions fantasques ou
de se focaliser sur des outils prometteurs mais qui n'émergeront
finalement jamais. Bref, tenir le cap du visionnaire raisonnable est
ardu, et en jeu se trouve la formation de nos futurs étudiants.
Par exemple, lorsque mon
prédécesseur a rempli le même type de dossier au printemps 2006,
comment aurait-il pu prévoir la place que prendraient les
smartphones dans l'informatique ? (l'Iphone n'est sorti qu'en
novembre 2007) ou comment aurait-il pu anticiper la place du
micro-blogging dans les stratégies de communication ? (Twitter
a été lancé en juillet 2006) Et donc dans ce contexte comment
construire un projet de formation pertinent sur une période aussi
longue sans dons de prophétie ? (et sincèrement, quelqu'un
capable de fournir des analyses précises et fiables sur 6 ans du
marché des NTIC peut exercer des activités beaucoup plus lucratives
que celle d'enseignant-chercheur)
Donc bien évidemment il
existe des méthodes pour ne pas se retrouver dans le faux, et ne pas
se scléroser sur une proposition d'enseignement figée dans le
temps. Et c'est là une grande partie de l'art de ce genre de
dossiers : composer une offre de formation à la fois solidement
étayée et présentant assez de souplesse pour permettre d'y
apporter des évolutions dans la durée, savoir discerner ce qui
relève des compétences stables et ce qui relève des courants
éphémères, savoir démonter ce qui relève du savoir-faire général
et ce qui relève de la maîtrise d'un outil voué à être remplacé.
En attendant est-ce que
je prévoie encore un cours de Flash pour 2014-2018, ou est-ce que
j'annonce directement un cours sur HTML 6 ?
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